L’échelonnement « soft » imaginé par le Ministre Rudi
Demotte a fait long feu. Peut-on vraiment s’en étonner ?
Impossible en Belgique, sans susciter un tollé général, d’interdire l’accès direct aux spécialistes, ou plus exactement de soumettre le remboursement de leurs consultations à l’accord préalable d’un collègue.
Le bâton paraissant exclu, on s'est rabattu sur la carotte. Ou on a essayé. Certes la prime de 5 euros accordée pour une consultation spécialisée, à la demande du médecin de famille rembourse le ticket modérateur de 3,85 euros de la consultation de médecine générale. Mais il faut que le médecin soit conventionné, que le patient ait le DMG (dossier médical global) et cela ne compense pas la perte de temps.
Au demeurant, si le système s’était généralisé, il aurait obligé l’assurance, pour chaque consultation spécialisée, à rembourser deux consultations au lieu d’une. Si c’est ainsi qu’on espérait faire des économies, on doit se réjouir de l’échec de l’expérience.
Or on peut imaginer d’autres moyens d'améliorer la rationalité des soins, la coopération entre médecins, l’échange d’informations, pour réduire les doubles emplois et les examens inutiles.
Ils passent par l’informatisation des dossiers, sans oublier ceux des consultations d'ONE (Office de la naissance et de l'enfance) et de PSE (Promotion de la santé à l'école). Subventionner les omnipraticiens pour qu'ils s'achètent un ordinateur n'est pas sérieux. Quel médecin n'en possède pas au moins un ? En revanche, les logiciels médicaux et les réseaux de transmission de données demeurent sous-utilisés, en partie par manque de normes.
A l’issue d’une consultation, mon logiciel médical permet l'envoi de la fiche patient au médecin de famille. Mais il faut que le confrère dispose du même logiciel et que je connaisse son adresse électronique. Dans ces conditions, tout se passe bien. Mais elles sont rarement réunies et si je fais l’effort d’adresser mes conclusions au médecin traitant pour les patients que nous suivons en commun, je ne reçois pas souvent l’information en retour.
Il faudrait donc des normes communes à tous les logiciels médicaux, un système automatique de transmission des données, et pourquoi pas, de traduction.
Je reçois des rapports en français, en néerlandais, en allemand, en anglais, parfois en d’autres langues. Mais quand des expatriés retournent chez eux, des lettres écrites en néerlandais ou même en français risquent d’être peu utiles au collègue américain, suédois ou turc qui prendra le relais…
La multiplicité des acteurs et l'apparition de dossiers informatisés en réseau imposent une centralisation. Le DMG en a introduit le concept. Il faut aussi un chef d'orchestre, de préférence le médecin que le patient consulte habituellement (si l'un et l'autre le souhaitent et si le praticien en a les capacités). Ce sera souvent un généraliste, mais pas forcément. Des malades atteints d'affections chroniques voient davantage leur spécialiste, sans doute mieux préparé aux problèmes qu'ils risquent de présenter. Malheureusement le DMG belge reste le monopole des omnipraticiens, seuls médecins de référence autorisés.
On a aussi oublié les pédiatres, et ceux dont ils sont le médecin. En 1968 Harry Shirkey avait forgé l'expression "therapeutic orphans" (orphelins thérapeutiques) pour déplorer que de nombreux médicaments pédiatriques n'aient été bien étudiés que chez l'adulte, demeurant même officiellement interdits chez les nourrissons et les enfants.
Dans un pays développé, la pédiatrie du premier échelon devrait être un droit de l'enfance. Du fait de la rareté relative des pédiatres, elle devient un privilège. Faut-il le payer par des discriminations ? Et faire des enfants, dont les parents ont préféré un pédiatre, des orphelins médico-sociaux ?
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